Vous êtes ici

Dans le cadre de la Semaine nationale de la Planification familiale, l'équipe communication du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) a réalisé un Quizz sur Facebook. Du 17 au 24 juin 2013, les internautes étaient invités à répondre durant la journée avant de recevoir, le soir, la réponse de Dr Coulibaly.

Norbert Coulibaly est administrateur national de programme de planification familiale et sécurisation des produits de la santé de la reproduction (SPSR) pour le FNUAP. Ainsi, il s'est prêté au jeu des questions-réponses et a fourni, avec assiduité, des réponses complètes.

Quelle est la méthode de contraception la plus utilisée au Burkina Faso?

Selon la dernière enquête démographique et de santé réalisée au Burkina Faso en 2010, la prévalence contraceptive globale est estimée à 16,2% pour toutes les méthodes et 15% pour les méthodes contraceptives modernes. Parmi celles-ci, les injectables (constitués essentiellement du Depo-Provera administré par injection intramusculaire), sont la méthode la plus utilisée (6,2% des femmes en union). La deuxième méthode la plus utilisée est l'implant, communément appelé Norplan du nom de la première marque du produit (3,4%). Ces deux méthodes sont prisées en raison non seulement de leur efficacité, mais aussi de la durée de protection (3 mois pour l'injectable, 5 ans pour l'implant) et de leur discrétion.

Les pilules constituent la troisième méthode la plus utilisée (3,2% des femmes en union). Les taux d'utilisation des autres méthodes modernes de contraception se présentent comme suit par ordre décroissant :

  • Préservatif masculin : 1,6%

  • Dispositif intra-utérin (DIU ou Stérilet) : 0,3%

  • Ligature de trompes : 0,2%

  • Méthode de l'allaitement maternel exclusif (MAMA) : 0,1%

  • Autres méthodes modernes (mousses, gelée etc.) : 0,1%

A l'exception du préservatif masculin ou féminin aucune autre méthode ne protège contre les infections sexuellement transmissibles (IST) et le VIH. Pour une bonne protection contre les grossesses non désirées, les IST et le VIH, il faut donc utiliser la double protection c'est-à-dire le préservatif lors des rapports sexuels en plus d'une des autres méthodes de contraception ci-dessus citées. Toutes ces méthodes sont disponibles dans tous les centres de santé. Les agents de santé sont disponibles pour vous orienter dans le choix (éclairé) de la méthode contraceptive qui vous convient.

 

Quelle est la région du Burkina Faso avec le plus fort taux de prévalence contraceptive?

La dernière enquête démographique et de santé réalisée au Burkina Faso en 2010 donne une prévalence contraceptive globale de 15% pour les méthodes modernes de contraception au Burkina Faso. Ce chiffre cache de grandes disparités selon l'âge, le niveau d'instruction et le lieu de résidence.  La figure ci-dessous montre les disparités entre les villes et les campagnes. La prévalence contraceptive (cf. tableau ci-dessous) est trois fois plus élevée en ville qu'en milieu rural.

Selon les régions, celle du Centre a le plus fort taux d'utilisation des méthodes contraceptives avec 36,1% des femmes en union, suivie des régions des Hauts bassins (27,9%) , des Cascades (19,1%), du Centre-sud (16,8%) et du Plateau central (16,3%). Les plus faibles prévalences contraceptives sont observées dans les régions du Sahel (7,0%), du Centre-est (9,1%) et du Centre-nord (9,5%).  Enfin cinq régions ont des prévalences contraceptives légèrement au-dessus de 10%. Il s'agit des régions du Sud-ouest (10,5%), de l'Est (10,9%), du Nord (10,9%), du Centre-ouest (11,1%) et de la Boucle du Mouhoun (12,1%).

La prévalence contraceptive varie considérablement selon le niveau d'instruction. Ainsi, elle est presque cinq fois plus élevée chez les femmes ayant un niveau secondaire et plus (50,5%) que chez les non instruites (11,8%).

Elle varie également selon l'âge ; les âges extrêmes ayant les plus faibles prévalences avec respectivement 6,6% chez les jeunes de 15 à19 ans et 10,2% chez femmes de 45 à 49 ans. La plus forte prévalence contraceptive (19,3%) s'observe chez les femmes âgées de 30 à 34 ans. En 2010, 18% des femmes en union âgées de 25 et 44 ans utilisaient une méthode contraceptive.

De gros efforts restent à faire au niveau des adolescents et des jeunes en matière de santé sexuelle et reproductive afin d'éliminer les grossesses non désirées (en milieu scolaire comme extrascolaire) de réduire significativement les IST et le VIH.

 

Quel est l'âge moyen des premiers rapports sexuels chez les jeunes filles/jeunes hommes au Burkina Faso?

La santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes est une priorité nationale à plus d'un titre. La fécondité des adolescentes (pourcentage des jeunes de 15 à 19 ans qui ont déjà eu un enfant ou qui sont enceinte pour la première fois) est très élevée. En 2010 elle était de 23,8% pour l'ensemble du pays avec une prépondérance en milieu rural (29,2%) par rapport aux villes (12,6%). La fécondité des adolescentes varie significativement selon le niveau d'instruction. Elle est cinq fois plus élevée chez les filles non instruite (32,9%) que chez celles qui ont au moins le niveau secondaire (6,1%). Trois régions ont une fécondité des adolescentes au-dessus de 30%. Il s'agit par ordre décroissant des régions du Sahel (39,3%), de l'Est (37,3%), du Sud-ouest (33,7%) et de la Boucle du Mouhoun (32,0%). La région du Centre est celle qui a le taux de fécondité des adolescentes le plus faible (8,4%).

L'âge des premiers rapports sexuels est un déterminant important de la fécondité en général et celle des adolescents et des jeunes en particulier. Il est estimé à travers l'âge médian (et non l'âge moyen) aux premiers rapports sexuels c'est-à-dire l'âge auquel la moitié de la population étudiée a eu son premier rapport sexuel. Selon l'EDS 2010, 7,7% des adolescents de 15 à 19 ans ont eu leur premier rapport sexuel à 15 ans. L'âge médian aux premiers rapports sexuels est de 17,7 ans pour les femmes et 20,8 ans pour les hommes. Cela s'explique en grande partie par le fait que les femmes entrent plus tôt en union (à 17,8 ans) que les hommes (25,5 ans). La figure ci-contre montre les disparités de l'âge médian aux premiers rapports sexuels selon le sexe, le milieu de vie et le niveau d'instruction.

On note également des différences selon les régions du pays notamment chez les femmes où l'âge médian aux premiers rapports sexuels varie de 16,1 ans au Sahel à 18,7 ans dans la région du Centre.

La précocité des rapports sexuels non protégés explique la forte fécondité des femmes (6 enfants en moyenne par femme) et des adolescentes burkinabè avec des conséquences fâcheuses au plan sanitaire et social : grossesses non désirées, avortements clandestins, accouchements compliqués, fistules obstétricales, déscolarisation, infection sexuellement transmissibles, VIH/SIDA, décès maternels, pour ne citer que celles-ci.

La solution : il faut renforcer l'éducation en matière de santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes afin de reculer au maximum l'âge des premiers rapports sexuels (ne soyez pas trop pressés) et promouvoir la planification familiale avec un accent particulier sur la double protection (condom + autre méthode contraceptive).

 

Quel est l'âge moyen des jeunes mamans, jeunes papas au Burkina Faso?

L'analyse de la fécondité au Burkina Faso montre qu'elle est très élevée (6 enfants en moyenne par femme) par rapport aux pays développés (1,71) et par rapport à la moyenne de l'Afrique de l'Ouest (5,22). L'âge auquel les femmes ont leur première naissance influence significativement leur fécondité et a des répercussions sur la santé des mères et des enfants, en particulier quand il est trop précoce.

On estime l'âge des jeunes mamans à travers l'âge médian c'est-à-dire l'âge auquel la moitié des femmes ont mis au monde leur premier enfant. Selon les données de l'EDS IV, l'âge médian des femmes à la première naissance est de 19,5 ans soit en moyen 1,7 ans après leur première union. Selon le milieu de vie, il est de 19,2 ans en milieu rural contre 21,4 ans à Ouagadougou. Cette tendance est observée entre les plus pauvres (19 ans) et les plus riches (20,8 ans). L'âge médian à la première naissance augmente avec le niveau d'instruction des femmes : 19,3 ans chez les non instruites, 19,9 ans chez celles du niveau primaire et 23,8 ans chez les femmes ayant au moins le niveau secondaire soit 4,5 ans de plus que celles sans instruction.

A l'exception des régions de l'Est (18,4 ans), du Sahel (18,7 ans) et du Centre (21,1 ans), les femmes des autres régions du Burkina ont sensiblement le même âge médian à la première naissance (autour de 19 ans).

Nous ne disposons pas de données spécifiques sur l'âge des jeunes papas au Burkina Faso.

 

Quel est le nombre de femmes qui meurent suite à une interruption de grossesse ou suite à des complications liées à la grossesse au Burkina Faso ?

Le décès maternel se définit comme « tout décès d'une femme qui survient au cours de la grossesse, de l'accouchement ou dans les 42 jours suivant l'accouchement pour une cause quelconque déterminée ou aggravée par la grossesse ou les soins qu'elle a motivés ». C'est un drame familial et social parfaitement évitable et contre lequel toute la communauté internationale est mobilisée, l'objectif étant de réduire de ¾ (75%) le taux de décès entre 1990 et 2015. C'est l'OMD 5.

Selon l'OMS, environ 250 000 décès maternels sont enregistrés chaque année dans le monde. L'analyse de ces décès montre que l'Afrique subsaharienne présente la situation la plus préoccupante. En 2010, dix (10) pays à travers le monde concentraient 60% des décès maternels enregistrés dans le monde. Parmi ces pays, la moitié sont des pays d'Afrique subsaharienne. De même, parmi les 40 pays au monde ayant les ratios de mortalité maternelle les plus élevés, 36 (90%) sont des pays d'Afrique sub-saharienne. Enfin il faut noter que le risque de décès maternel est 7 fois plus élevé en Afrique (1/39) qu'en Asie du Sud-est (1/290). Comparé aux pays développés (où il est de l'ordre de 1/3.800), ce risque est presque 100 fois (97) plus élevé.

Au Burkina Faso, le ratio de mortalité maternelle est de 341 décès pour 100 000 naissances vivantes selon l'EDS IV. Les principales causes directes de ces décès sont par ordre d'importance : les hémorragies (30%), les infections (23%), la rétention placentaire (11,40%), les ruptures utérines (10%), les  complications des avortements ou interruptions de grossesse (10%), les éclampsies (4%) et les anémies. On distingue les interruptions volontaires de grossesse (IVG) qui sont illégales au Burkina et de ce fait, sont effectuées dans la clandestinité ; et les interruptions de grossesse pour raison médicale. Les décès maternels dus aux complications d'avortement sont le fait d'IVG dans la grande majorité des cas. La figure ci-contre montre la répartition des 743 décès enregistrés dans les centres de santé en 2011, selon les causes directes.

Comme on le constate, beaucoup de décès sont classés dans le groupe « autres » causes qui regroupe les anémies et de nombreuses autres complications.

Trois actions principales permettent de lutter efficacement contre la mortalité maternelle :

  • L'assistance qualifiée à l'accouchement c'est-à-dire faire en sorte que tous les accouchements soient assistés par un personnel de santé qualifié. Tout accouchement comportant un risque de complication et de décès, seul un agent de santé qualifié peut détecter à temps la complication et prendre les mesures salvatrices idoines.

  • Les soins obstétricaux d'urgence qui permettent de faire face efficacement aux complications qui surviennent au cours de la grossesse, de l'accouchement et dans les suites de couches.

  • La Planification familiale. Selon les études, elle contribue à hauteur de 30% à la réduction de la mortalité maternelle.

Cela explique les mesures prises par le gouvernement pour faire face à la situation et accélérer l'atteinte de l'OMD 5 à savoir réduire le taux de décès maternel de l'ordre de 566 décès en 1993 à 121 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2015:

  • La relance de la planification familiale avec pour objectif d'augmenter la prévalence contraceptive (méthodes modernes) de 15% en 2010 à 25% en 2015;

  • La subvention à hauteur de 80% des accouchements et des SONU;

  • La gratuité des soins prénatals et préventifs en général;

  • La gratuité de la prise en charge du paludisme grave chez la femme enceinte et l'enfant.

Pour ne citer que celles-ci.

 

Quelles sont les complications qui peuvent survenir suite à des accouchements qui ne sont pas espacés d'au moins deux ans (pour la femme, pour l'enfant)?

L'espacement des naissances a une influence positive sur la santé de la mère et de l'enfant. On le mesure par l'intervalle intergénésique.  Des intervalles intergénésiques courts (inférieur à 24 mois) augmentent les risques de maladie et de décès aussi bien chez les enfants que chez leur mère. Les accouchements trop rapprochés entrainent une dégradation plus ou moins rapide des capacités physiologiques de la femme et l'exposent davantage aux différentes complications de la grossesse, de l'accouchement et des suites de couches : Asthénie, avortement spontané, accouchement prématuré, retard de croissance intra-utérin, mort fœtal in utéro, dystocie, hémorragies, infections, psychose puerpérale etc. Le risque de décès maternel augmente significativement avec la multiparité.

Au Burkina Faso, l'intervalle intergénésique médian est de 35,9 mois (3 ans). Dans 87 % des cas, l'intervalle entre naissances est supérieur ou égal à 24 mois. Mais, pour environ une naissance sur huit (13 %), l'intervalle intergénésique est trop court (inférieur à 24 mois).

L'intervalle intergénésique est plus élevé (41,7 mois) en milieu urbain qu'en en milieu rural (35,2 mois).

L'âge des mères à la naissance influe sur l'espacement des naissances. En effet, d'un minimum de 28,5 mois chez les adolescentes de 15-19 ans, il passe à 37,3 mois pour celles dont la mère est âgée 30-39 ans et à 41,4 mois parmi celles de 40-49 ans.

L'intervalle intergénésique varie également selon le niveau d'instruction. Il est de 35,5 mois chez les femmes non instruites contre 47,6 mois chez celles ayant un niveau secondaire et plus soit un an de plus. Selon le niveau de vie, l'intervalle intergénésique augmente avec le niveau de vie. Il est de 34 mois dans le quintile de femmes les plus pauvres contre 42 mois chez les plus riches.

Comme vous l'aurez certainement remarqué, ces disparités entre milieu urbain et rural, selon l'âge des mères et selon les niveaux d'instruction et de vie sont superposables à celles observées au niveau de la prévalence contraceptive. L'utilisation des services de planification familiale améliore l'espacement des naissances. La planification familiale est le meilleur moyen de retarder la survenue d'une grossesse et d'espacer les grossesses et les naissances. L'utilisation d'une méthode de planification familiale permet d'éviter non seulement les grossesses précoces, les grossesses non désirées « accidentelles » mais aussi les grossesses rapprochées, les avortements et les infections sexuellement transmissibles (double protection) tout en ayant une sexualité épanouie. Entre deux accouchements, la femme a le temps de recouvrer pleinement sa santé, d'alimenter convenablement son enfant,  d'assurer une croissance normale de l'enfant, de travailler et contribuer efficacement à l'épanouissement de la famille.

 

Comment peut-on imaginer la situation du pays en 2050 si la fécondité n'est pas maîtrisée?

Le recensement général de la population et de l'habitat effectué en 2006 a établi la population du Burkina Faso à 14 017 262 habitants avec une prédominance féminine (51,7%) et un taux d'accroissement annuel moyen de 3,1% et un taux d'urbanisation de 22,7%. L'analyse de cette population met en exergue sa jeunesse. L'âge moyen est de 21,8 tandis que l'âge médian est de 15,5 ans c'est-à- dire que la moitié de la population a entre zéro (0) et 15,5 ans.

Le graphique ci-dessous montre l'évolution projetée de la population en fonction de la prévalence contraceptive. Une augmentation de la prévalence contraceptive de 1,5 point par an permettra de réduire la population de 55 millions d'habitants à 39 millions à l'horizon 2050 (soit 16 millions) donc une meilleure maîtrise de la croissance démographique, facteur de développement. Une bonne maîtrise de croissance démographique permet d'en tirer le meilleur dividende en termes de développement social (éducation, santé, emploi etc.) et économique (ressources, production, environnement etc.).

 

Le plan national de relance de la planification familiale 2013-2015 vise une augmentation de la prévalence contraceptive de 2,7 points par an. Des stratégies efficaces existent et sont déclinées dans le document pour atteindre cet objectif.

Quelles sont, selon vous, les trois raisons principales pour adopter la planification familiale?

  • Au plan sanitaire : la Planification familiale contribue à réduire les décès maternels d'environ 30%. Elle améliore la santé de la mère et de l'enfant, et contribue au bien-être de la famille, de la communauté et de la société. Il existe une gamme variée de méthodes de planification familiale au choix des client(e)s. Ces méthodes peuvent être obtenues dans tous les centres de santé publics ou privés à des coûts fortement subventionnés. Ces méthodes sont efficaces. Bien utilisées, elles protègent contre les grossesses non désirée et les infections sexuellement transmissibles et le VIH avec les complications qui vont avec.

  • Au plan démographique : A l'échelle familiale, la Planification familiale permet au couple de déterminer le nombre d'enfants qu'il souhaite avoir et de choisir le moment de les obtenir. Ce faisant elle permet au couple de subvenir convenablement aux besoins de la famille et d'assurer la survie et le développement  harmonieux des enfants, ainsi que leur éducation.

    Au plan national, la PF est un puissant facteur de maîtrise de la croissance démographique. Elle contribue ainsi au renforcement du capital humain grâce à une meilleure santé, une meilleure éducation et une meilleure formation de la population.

  • Au plan économique : la PF contribue à l'amélioration de la croissance économique et au développement du pays. Le développement du Burkina Faso repose en grande partie sur son capital humain. La Planification familiale est le moyen par excellence de renforcement de ce capital.

 

Propos receuillis par Doline CHARMILLOT - unité de communication, UNFPA